Avec la construction du pavillon Pierre Lassonde, le MNBAQ devait se devait de respecter la Politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement des bâtiments et des sites gouvernementaux et publics. Pour y répondre, le Musée devait intégrer une œuvre d’art public à son pavillon. Il a fait mieux, il en a intégré trois.
L’art public, qu’est-ce que c’est?
L’art public, c’est toute forme d’art qui est créé dans le but d’occuper un espace public. Donc ce n’est pas relié à la technique utilisée, mais plutôt au lieu ou l’œuvre est exposée. À ne pas confondre avec l’art de la rue ou art urbain pour certains (street art en anglais). Et ce, même si l’art public peut être de l’art de la rue et vice et versa.
L’art de la rue, c’est un mouvement artistique tandis que l’art public est plus, disons, axé sur la nature de l’œuvre. Aussi, l’art public est souvent produit en collaboration avec les autorités, les propriétaires des lieux, etc. Elles sont parfois des commandes ou le résultat de concours. Leur but est de s’intégrer au bâtiment, à l’architecture, à l’espace qu’elles occupent.
L’art de la rue, lui, peut (souvent!) être pratiqué dans l’illégalité — ou plutôt sans la permission des autorités, propriétaires, etc. Et ce, en général, dans un but engagé ou politique. Il peut aussi prendre plusieurs formes (installation, art visuel, performance, etc.). Pensons aux graffitis, aux pouliches qu’on a vues être semées ici et là en ville il y a deux ou trois (?) étés.
Une autre différence entre les deux, c’est le fait que l’art public a souvent un caractère permanent. Donc durable dans le temps. Alors que l’art de la rue peut revêtir (ou non) un caractère éphémère selon l’œuvre, le discours, le contexte de création, le lieu choisi.
Un des grands artistes de rue et représentant du mouvement dont vous avez probablement entendu parler est Banksy.
Ce résumé est assez simpliste, car on pourrait discuter de cela pendant des heures. Mais ça vous donne une idée de base.
Une politique? Que dit-elle?
La Politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement, vous la connaissez peut-être sous le surnom de la politique (ou programme) du 1 %.
Selon cette politique québécoise, tout bâtiment ou site public qu’on construit doit accorder au moins 1 % de ses coûts de construction à l’intégration d’une œuvre d’art au lieu qui sera bâti. L’œuvre doit bien s’intégrer au lieu et refléter son environnement, s’harmoniser à l’architecture, aux usagers et la vocation de l’endroit. Cette œuvre doit aussi être choisie par le biais d’un concours chapeauté par le ministère de la Culture et des Communications.
Cette mesure existe depuis 1961 et a été revue et révisée quelques fois depuis (entre autres en 1981, je crois). Elle a permis jusqu’ici de créer plus de 3 500 œuvres d’art public. Et d’enrichir nos bâtiments, nos espaces publics d’œuvres d’artistes talentueux créées avec un respect du lieu et des gens. Agrémenter leur œil, mais aussi leur quotidien, leur espace de vie.
Une de ces récentes intégrations à avoir fait parler d’elle dans notre ville est entre autres l’œuvre du duo d’artistes Cooke-Sasseville qui sera créée pour la place Jean-Béliveau du centre Vidéotron.
Pour en savoir plus sur cette politique, consultez la page Politique d’intégration des arts à l’architecture sur le site du ministère de la Culture et des Communications.
L’art public intégré au pavillon Pierre Lassonde
Comme je le disais plus haut, en plus de l’œuvre exigée par la politique du 1 %, le Musée a décidé d’intégrer deux œuvres d’art public de plus à son pavillon Pierre Lassonde. Cela a été possible grâce à des dons de Gaz Métro et de la Fondation Monique et Robert Parizeau. Les œuvres sont le fruit du travail de trois artistes :
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Ludovic Boney
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Patrick Coutu
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Michel Broin
«Une Cosmologie sans genèse» de Ludovic Boney dans la cour intérieure
Une Cosmologie sans genèse est l’œuvre de Ludovic Boney et occupe la cour intérieure du pavillon. Monumentale, elle occupe toutefois minimalement l’espace : elle laisse toute la place de la cour disponible pour la circulation, les activités et le repos.
Elle est composée de trois mâts imposants qui s’élèvent du sol en oblique et disposés pour créer ce qui, je trouve, ressemble vaguement à une forme de tipi et répond au clocher de l’église de Saint-Dominique. En leur centre, suspendu par un assemblage complexe de cordage visible et intégré à l’œuvre, se trouve une sphère façonnée par 800 (!) cônes d’aluminium coulé.
La sphère représente un noyau — d’atome, de vie, de création — incomplet, ou en formation, dont le centre rond est vide, ouvert, à remplir. Une image des possibles. Du travail créatif toujours en bouleversement et en quelque sorte infini. Une représentation, aussi, de l’humain, de la société, tous deux en constante évolution.
Et cette impression, peut-être, que ce noyau pourrait exploser ou imploser. À l’image de notre monde et de ce qui s’y passe. De la création.
Cette œuvre est celle qui a été financée par la politique du 1 %. Elle a donc remporté le concours national mis en place par le ministère de la Culture et des Communications et le MNBAQ pour la choisir.
Ludovic Boney est un artiste de descendance huronne-wendate qui a une démarche engagée envers l’art public. Ses œuvres sculpturales s’intègrent bien aux lieux où elles se trouvent et cherchent à améliorer la qualité de vie reliée à ces sites. Il cherche à créer des œuvres accessibles autant pour les néophytes que pour les connaisseurs. Minimaliste, il accorde énormément d’attention à ses matériaux et est un habitué des structures imposantes. Depuis 2006, il a créé plus de 14 projets d’intégration d’art à l’architecture.
Pour en savoir plus sur Ludovic Boney, consulter son site web officiel.
«Le Jardin du sculpteur» de Patrick Coutu sur la terrasse Fondation Monique et Robert Parizeau
Le jardin du sculpteur est l’œuvre qu’on retrouve sur la terrasse au niveau 3 du pavillon Pierre Lassonde. Elle est la création de l’artiste Patrick Coutu.
L’œuvre prend place dans un rectangle rempli de sable doré. Elle consiste en plusieurs sculptures composées de plusieurs petits cubes qui prennent la forme de végétaux et ressemblent aussi à des tours, des pyramides et autres structures architecturales. Les tours rappellent le clocher néogothique de l’église Saint-Dominique dont on a une belle vue de la terrasse.
C’est peut-être le sable doré, mais j’ai aussi eu cette impression de jardin désertique. Certains végétaux ressemblent à des cactus (c’est mon impression ici), les pyramides ne sont pas sans rappeler l’Égypte et les tours peuvent faire penser à des minarets… Une façon de voir ce jardin comme une réflexion de spiritualité face au bâtiment religieux du paysage réel.
Un jardin luxuriant qui est aussi un écho du parc qui entoure le Musée et le jardin du toit adjacent.
Particularité de cette œuvre : elle s’adaptera aux saisons. Évoluera. Changera. Donc, vous aurez tout à gagner à venir la voir quatre fois par année.
L’œuvre Le jardin du sculpteur a été réalisée grâce à la contribution financière de la Fondation Monique et Robert Parizeau (qui a donné son nom à la terrasse). Elle a aussi été choisie par le biais d’un concours cette fois organisé par le MNBAQ.
Patrick Coutu s’intéresse beaucoup aux calculs arithmétiques et aux modèles produits par les chercheurs et scientifiques afin de comprendre des phénomènes naturels. C’est pourquoi plusieurs de ses sculptures, comme celles de l’œuvre mentionnée ci-haut, sont formées par une accumulation de petits cubes qui font penser à des pixels. Patrick Coutu est aussi l’artiste créateur de l’œuvre La Moderne qui fait partie de la collection de l’exposition temporaire Installations à grande échelle.
Pour plus de renseignements sur le travail de Patrick Coutu, visitez son site web.
«Interlude» de Michel de Broin sur la Place du Musée
Interlude est l’œuvre qu’on trouve sur la Place du Musée qui se trouve devant le pavillon Pierre Lassonde, face à Grande Allée.
L’installation consiste en une structure de télévision (bronze patiné) posée sur un morceau de tronc d’arbre (aluminium moulé et patiné) à l’intérieur de laquelle brûle une flamme — une vraie! Devant ce téléviseur sont disposées des bûches (aussi en aluminium) qui peuvent servir de bancs. N'hésitez pas à vous y asseoir.
Une disposition qui ramène le souvenir des camps d’été ou du camping et leurs soirées autour du feu. Elle rappelle aussi, cette habitude des familles de la fin du 20e et du début du 21e siècle de s’asseoir devant le téléviseur.
Avec cette installation, l’artiste met en scène une fausse télévision dans laquelle brûle un vrai feu un peu à l’image de ces vidéos qui gagnent en popularité et qui permettent d’afficher un feu de foyer sur nos écrans. Le fait que le feu brûle a l’intérieur d’un téléviseur remet en question, pour le spectateur, l’existence réelle de la flamme — en fait, on se demande si c’est une projection ou une vraie? Une espèce de mise en abîme de nos écrans, du virtuel. Les bûches ne sont pas des vraies, même si elles en ont l’air, la télévision aussi. Mais le feu, lui, est réel. Mais on en doute.
Cette œuvre est une commande du MNBAQ financée par une contribution de Gaz Métro.
Michel de Broin est un artiste québécois dont le travail allie sculpture, photographie, vidéo, performance, dessin. Beaucoup de ses œuvres utilisent et mettent en scène (ou non) les objets du quotidien sortis de leur contexte pour appuyer un propos, son regard sur notre société, sur nos systèmes techniques et sociaux. À la fois ludiques et critiques, ses œuvres sont des détournements d’objets, des paradoxes.
Pour en apprendre plus sur la démarche et l’œuvre de Michel de Broin, visitez son site web.
En conclusion
Le MNBAQ a suivi la loi en intégrant une œuvre d’art public à son bâtiment à une hauteur de 1 % de son budget de construction. Il a aussi rempli sa mission en tant que musée d’art en décidant d’en intégrer deux autres.
Ces trois œuvres font partie prenante du nouveau pavillon. Elles vibrent, respirent à son rythme. Elles vivent sous les regards, les pensées des visiteurs.
Alors, venez les voir pour leur donner encore plus de souffle.